Lancée en 2019, l’application israélienne Gravez propose un système de navigation permettant d’accéder à l’emplacement exact d’une tombe. Ce GPS pour cimetières complété d’une offre de services en ligne entend apporter une réponse technologique aux réalités des funérailles 2.0.
Un GPS pour trouver son chemin vers la tombe d’un proche
En Israël, l’espace est rare et les cimetières traditionnels surpeuplés. De vastes lieux de sépulture ultra-modernes sont en train de se développer. Dans les deux cas, l’orientation est souvent compliquée, une des raisons qui ont motivé les ingénieurs Guy Liany et Israël Gold à développer une technologie de navigation adaptée au contexte funéraire.
Créée d’abord pour faciliter le travail des sociétés professionnels du funéraire, elle s’adresse désormais à tous ceux qui peinent à retrouver le chemin menant aux tombes de leurs proches. L’appli séduit enfin les généalogistes et les personnes en quête d’un ancêtre dont la trace s’est perdue après la Shoah. “Quelqu’un a trouvé sur Gravez la tombe d’un membre de sa famille qu’il croyait disparu dans les camps. Il avait en réalité survécu à l’Holocauste et émigré en Israël où il était enterré ”, raconte Guy Liany.
A ce jour, l’entreprise Corido qui développe l’application a déjà cartographié et entré dans sa base de données 1,3 milliards de tombes dans les 30 plus grands cimetières d’Israël, soit 40% des sépultures du pays. La méthode utilise des drones couplés à un système d’imagerie, tandis que des mises à jour régulières garantissent l’actualité des informations. L’entreprise veut s’étendre à l’international. Un projet est d’ailleurs à l’étude avec un cimetière juif de Marseille.
Un éventail de services à portée de clic
Pour localiser la tombe d’un défunt, il suffit d’entrer son prénom, son nom ainsi que l’année approximative de son décès dans une interface très simple. En cas d’homonymes, plusieurs propositions s’affichent et des questions supplémentaires peuvent aider à préciser les résultats. La fonction de navigation est gratuite pour les particuliers.
Mais l’ambition de Gravez ne s’arrête pas là, précise son co-fondateur Guy Liany :
“Notre souhait est d’aider les gens à se rappeler de leurs disparus et à maintenir la connexion avec eux. Nous avons commencé il y a six mois à associer à notre système de navigation différents prestataires de services funéraires. Les utilisateurs peuvent ainsi payer une entreprise à distance pour prendre soin d’une tombe, y déposer une bougie, des fleurs ou une prière, par exemple. Nous avons développé aussi des services d’obsèques en vidéo (cf. Dossier Happy End – Organiser des obsèques), qui permettent de visionner les funérailles en direct et restent accessibles à tout moment pour les personnes disposant du lien. Et nous travaillons à la création d’une plateforme virtuelle sur laquelle les endeuillés pourront charger des albums photos, des textes, des souvenirs…
Un code QR appliqué sur la tombe permettra dans le futur aux visiteurs du cimetière de se connecter à la vie des défunts, avec des profils public et privé selon le désir des familles.”
Vivants ou morts, tous connectés ?
Pour les fondateurs de Gravez, “les funérailles feront de plus en plus appel aux technologies numériques et au virtuel dans le futur. Beaucoup de projets existent, il y a même une entreprise qui veut développer des hologrammes de défunts !”
Comment cette évolution va-t-elle impacter notre rapport à la mort ? Une technologie comme Gravez ne nous mène-t-elle pas sur un chemin qui nous coupe toujours plus de sa réalité ? “Non”, estime Israël Gold, “car elle offre simplement des façons modernes d’honorer les défunts, en phase avec le mode de vie des générations actuelles qui est à la fois très mobile et très connecté. L’idée est de permettre aux gens de rester en lien, que ce soit entre endeuillés ou avec leurs morts – des morts dont les histoires pourront rester vivantes et accessibles.”
Guy Liany précise encore que le numérique n’est pas synonyme de froideur et n’empêche pas les émotions fortes : “Alors que notre offre de services était encore en cours de création, nous avons reçu un appel d’une famille des Pays-Bas qui ne pouvait pas se déplacer pour célébrer le 30ème anniversaire d’un décès. Ces gens ont pleuré au téléphone lorsqu’on leur a confirmé que nous pouvions faire nettoyer la tombe pour eux et leur envoyer des images. Nous faisons quelque chose d’important qui permet justement à des familles de réinvestir à distance les rituels de mémoire.”
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