Cynthia Marion est une Neztoile. Deux fois par mois, avec l’équipe régionale ressource de soins palliatifs pédiatriques de la Réunion, et quatre fois par mois à l’hôpital d’enfant Saint François d’Assise, elle se rend au chevet des enfants en fin de vie, afin d’apporter joie et bonheur à domicile.
Quel est la différence entre un accompagnement d’un adulte et d’un enfant en fin de vie ?
Accompagner un enfant en fin de vie est un processus particulier, qui diffère de l’accompagnement de la fin de vie chez l’adulte. Ils ont un rapport simple à la mort. Ce que je remarque régulièrement, c’est que leur peur est essentiellement celle de laisser leurs parents et leurs frères et sœurs. C’est leur souffrance à eux qui les préoccupe et moins la leur. Les enfants savent reconnaître que le chagrin est immense et les peines dévastatrices alors ils veulent qu’on s’occupe de leur maman, de leur papa, de leur fratrie, et qu’on prenne soin de leur famille. La particularité lorsque l’on accompagne un enfant en fin de vie, c’est l’accompagnement des parents.
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Comment les parents gèrent-ils la fin de vie de leur enfant ?
Le comportement des parents est très variable en fonction des familles. Les parents sont souvent des accompagnants exceptionnels. Ils sont nombreux à vouloir créer une bulle de joie autour de leur enfant, pour qu’il parte dans le bonheur et la sérénité. Ils ont ce souci de protection réciproque. Les parents souhaitent protéger l’enfant et généralement l’enfant veut aussi protéger ses parents. La présence d’une personne tiers pour ouvrir le dialogue sur “l’après”, lorsque l’enfant ne sera plus là, peut être bénéfique. “Quand tu vas partir, on veillera sur tes parents”, leur dis-je régulièrement. Les parents souhaitent cultiver la joie jusqu’au bout. L’enfant est dans la joie par nature mais l’adulte, lui, va redoubler d’activités, en termes de cadeaux, de surprises. C’est d’ailleurs quelque chose que l’on ne fait pas avec nos adultes en fin de vie, à tort.
Parlez-vous du jour de la mort de l’enfant avec les familles ?
Dernièrement, j’ai accompagné des parents s’occupaient de leur enfant en fin de vie. Avec eux, j’ai abordé le jour du décès. On a parlé des choses qu’ils souhaiteraient mettre en place pour le jour de ses obsèques comme des ballons, de la musique, quel genre de fête il voudrait.C’est une chose que je ne fais pas systématiquement. La plupart du temps, les parents ne sont pas prêts à en parler.
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Y-a-t’il quelque chose de particulier que vous proposez aux familles lors de votre accompagnement ?
En tant qu’accompagnante, il est important pour moi d’aider les parents à construire des rituels avant la mort de l’enfant. Car si le corps disparaît, le lien reste. On n’oublie jamais quelqu’un qu’on a perdu. Les rituels que les parents auront mis en place durant l’accompagnement pourront se poursuivre comme des temps d’hommage. Mon travail d’accompagnante est de créer un lien, qui ne va pas se rompre, avant et pendant, pour après. Ainsi, je les prépare au deuil. Toutefois, certaines familles ne sont pas prêtes à mettre en place des rituels. J’ai accompagné une adolescente, qui elle, continuait de se battre pour guérir. Ainsi, il m’était impossible d’aborder le sujet de son départ. Si elle voulait garder espoir de guérir, c’était son choix et je n’avais pas le droit de l’en priver. Ces cas de figure montrent bien que rien n’est universel. Si je sens que les parents et l’enfant sont prêts, alors je crée l’espace nécessaire pour parler de la mort. S’il ne le sont pas, je ne l’amène pas. Ce chemin est intime et personnel.
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Comment se comportent les équipes médicales autour d’un enfant en fin de vie ?
Exercer dans des spécialités où les enfants peuvent être en fin de vie. Mon rôle est de réfléchir aux ressources que je peux apporter à ces équipes, car malheureusement, les soignants sont très peu armés à la mort pédiatrique, ni préparés à accompagner l’enfant en fin de vie, même si c’est leur quotidien. Les parents font souvent face à des maladresses médicales. Tout le monde est désarmé face à la mort d’un enfant parce qu’elle met face à un sentiment d’injustice, à de la colère. Mais les parents ont besoin d’être écoutés, épaulés et secondés traités le mieux possible, et des méthodes de communication doivent être enseignées. Les soignants ont si peur de mal faire qu’ils peuvent s’enfermer derrière des techniques médicales ou des automatismes. Pourtant, ce sont des moments qui ont besoin d’être allégés pour les familles. Il faut leur rappeler que ce n’est pas maladroit de la part d’un soignant d’apporter de la joie dans une chambre d’enfant qui va mourir.
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