Les coopératives funéraires organisent des obsèques sur-mesure
Chaque défunt est différent, chaque cérémonie devrait l’être. Personnaliser cette cérémonie d’hommage, c’est la mission que se sont fixées les coopératives funéraires en organisant nos obsèques. Et pour cela, leurs conseillers nous accordent du temps. Deux heures, trois heures parfois plus…
« Durant le premier rendez-vous avec la famille, nous réglons tous les aspects administratifs. Puis, nous calons un second rendez-vous où ne nous ne parlerons que du défunt et de la cérémonie. On est alors dans une écoute des envies et besoins de la famille et on ouvre avec elle le champ des possibles, dans les limites légales », explique Isabelle Georges, présidente de la Coopérative funéraire de Rennes, qui a ouvert il y a à peine une semaine et déjà organisé deux cortèges…
« On a pris part aux funérailles civiles d’un homme qui était rockeur et motard dans un salon funéraire communal. Ayant eu le temps d’expliquer à la famille qu’ils pouvaient décorer la salle, ils s’en sont donné à cœur joie. Accessoires de moto, disques… et musique à fond. Ils n’ont pas hésité à s’emparer des lieux et le fils m’a même reproché que notre équipe se soit habillée en noir. Il m’avait rencontré à l’hôpital et je portais des Dock Martens jaunes », raconte Isabelle Georges dans un sourire. « Il aurait aimé que je les porte le jour de l’enterrement ! ».
Les rites funèbres laïques sont aussi la priorité de Syprès, coopérative qui a ouvert en octobre 2019 à Bordeaux, sous l’impulsion de Eudileuza Gallet, psychanalyste, et de son mari, Olivier, directeur de projets dans le monde associatif.
« Aujourd’hui, la France compte 63% d’agnostiques et d’athées, selon WIN Gallup International. Comment honorer ses morts et ritualiser la séparation en dehors d’un lieu de culte ? A la perte d’un proche, les familles sont dans la sidération et ne mesurent pas forcément l’importance de cette étape. On est là pour les y sensibiliser et les accompagner dans la construction d’un rituel avec des textes, de la musique, des gestes symboliques », avance-t-elle.
Pour cela, la Coopérative s’est entourée d’artistes locaux (chanteurs, musiciens, metteur en scène, comédiens…) et a créé un laboratoire de réflexion sur les rites funéraires pour donner sens à ce départ. Une initiative précieuse à l’heure où la mort n’a plus sa place dans la société…
Leurs fondateurs sont animés par l’envie de faire bouger les choses
Sabine, Eudileuza, Olivier, Isabelle, Brigitte, Sophie, Greg… Les hommes et les femmes, à l’origine de ce mouvement, n’avaient rien à voir avec le funéraire au départ. « Je n’avais jamais poussé les portes d’une entreprise de pompes funèbres jusqu’à ce que la mort d’un proche m’y amène. Et je suis tombée des nues ! J’ai découvert un magasin d’un autre temps, et on m’a parlé une langue que je ne connaissais pas », se souvient Isabelle Georges, ex-directrice d’un groupement d’entreprises, partie se former au Canada lors d’une année sabbatique pour proposer une autre alternative en France. Idem pour Eudileuza, d’origine Brésilienne, à l’origine de Syprès.
« Notre vision de la mort en France est très particulière. Elle est occultée, vécue dans l’austérité. J’avais l’envie de la remettre au centre de nos vies », confie-t-elle. Pour cela, Eudileuza est partie en Suisse se former au métier de célébrante laïque. En revenant en France, elle a proposé ses services aux entreprises du secteur en tant que prestataire : « Aucune entreprise n’a vu l’intérêt de faire appel à mes services. Heureusement, il en fallait plus pour me décourager ! », dit-elle.
Les personnes qui les ont rejoints viennent de milieux très différents : administration, graphisme, finances, communication… Et toutes ces compétences sont mis au service d’une même cause : faire en sorte que chaque famille soit accompagnée dans leur individualité dans cette étape cruciale de leur vie.
C’est un véritable mouvement citoyen
Dans les années quarante, au Québec, les entreprises funéraires avaient été rachetées par des fonds de pensions et les funérailles avaient atteint des prix exorbitants, 30 à 40% plus chers que dans le reste du Canada. Les familles rencontraient de plus en plus de difficultés pour les organiser et se faisaient déposséder de cette ultime étape. Un collectif de citoyens, soutenus par l’église, s’est uni pour créer une entreprise d’utilité sociale dans le secteur : la coopérative funéraire.
Aujourd’hui, au Québec, les coopératives funéraires représentent 50 % du marché funéraire et les prix se sont régulés, à tel point que les fonds de pension se sont désintéressés du secteur ! Dans une coopérative funéraire, le capital est détenu par les sociétaires et ce sont eux qui prennent les décisions. Chaque sociétaire détient une part (au minimum 20 €), qui correspond à un vote. La France connaît la même évolution : une douzaine de réseaux d’entreprises concentrent la moitié du chiffre d’affaires du secteur et les prix grimpent…
« Il fallait proposer autre chose et faire le contrepoids avec les leaders du marché ! Chez nous, 57 % du bénéfice est réinvesti. Quand ils adhèrent au projet, les sociétaires font d’abord un investissement militant. Ils s’assurent aussi qu’ils seront enterrés comme ils le souhaitent », souligne Sophie Dronet, à l’origine avec deux autres femmes de la naissance de la première coopérative funéraire à Nantes en 2016. A ce jour, 300 sociétaires soutiennent ce mouvement citoyen à Nantes, 120 à Rennes, 60 à Bordeaux. Le début d’une belle aventure.
A l’heure actuelle, la loi n’autorise pas comme c’est le cas au Canada, que les parts investies permettent de financer les funérailles du sociétaire mais les coopératives réfléchissent à un moyen de faire évoluer la loi.
Les coopératives funéraires vous informent en toute transparence
« Souvent, les familles ne connaissent pas leurs droits, leurs possibilités, ne savent pas où elles peuvent disperser les cendres, ni qu’on peut choisir une tombe végétalisée… Notre rôle c’est de leur donner un maximum d’informations pour qu’ils fassent un choix éclairé », insiste Isabelle Georges, présidente de la Coopérative de Rennes.
Ce besoin d’informer est aussi valable pour les personnes désireuses d’anticiper leurs funérailles. Les coopératives les reçoivent longuement dans leurs bureaux pour répondre à leurs questionnements et parfois leurs inquiétudes. « On peut discuter une heure et demi avec eux sans signer de contrats. Et on les incite toujours à vérifier s’ils n’ont pas déjà souscrit à une assurance obsèques ou une assurance vie. C’est souvent le cas… », remarque Isabelle Georges. L’information passe aussi par l’organisation de soirées à thème ou de café mortels (assistez à un Apéro de la mort).
« On réunit les gens en présence d’un spécialiste des rites funéraires, d’un conteur… et on organise des rencontres pour que les gens puissent parler librement de la mort et du deuil dans des lieux publics », raconte Eudileuza Gallet, co-fondatrice de Syprès. « Il y a un gros tabou sur la mort en France. Avec les cafés mortels, on invite les gens à parler de la mort dans la cité, tout le monde vient et exprime son point de vue. Et ça fait du bien à tous… », se réjouit la psychanalyste.
A écouter : Notre podcast avec François Michaud Nérard, auteur de « Les cimetières, que vont-ils devenir ? »
Elles pratiquent le juste prix
La politique des coopératives funéraires : limiter leurs marges sur les frais matériels et logistiques obligatoires (cercueil, capiton, transports, marbrerie…) et faire en sorte d’alléger la facture. « Si nous pouvons réduire les frais, nous le faisons comme d’encourager la famille à apporter un drap pour se passer de capitons. Il n’est pas question de facturer des frais dont on peut se passer », remarque Sophie Dronet, à Nantes.
A Rennes, la coopérative propose même de prêter une urne aux familles qui choisissent la dispersion des cendres. « Pourquoi acheter une urne qui ne va parfois servir que quelque heures ? », s’interroge Isabelle Georges. En revanche, les coopératives facturent, via un forfait, leur temps d’accompagnement (entre 900 et 1000 euros en moyenne).
« Nous ne faisons pas de low cost », insiste Sophie Dronet. Les prix facturés par les coopératives sont d’ailleurs assez proches de ceux pratiqués par l’ensemble du secteur : il faut compter entre 3500 et 4500 € la cérémonie.
Elles font rimer mort et écologie
C’est une des priorités de leur mouvement : limiter l’impact environnemental des défunts. « Nous ne faisons appel qu’à des fournisseurs locaux, déconseillons les soins de thanatopraxie et les monuments funéraires. Beaucoup de familles ne savent pas quel impact leurs choix auront sur l’environnement. Notre devoir est de leur expliquer », explique Edileuza Gallet, co-créatrice de Syprès.
La Coopérative a trouvé un fournisseur de bois certifié forêt durable en Dordogne pour la fabrication des cercueils et travaille sur le projet d’une forêt cinéraire à Bordeaux.
A la coopérative funéraire de Rennes, une rencontre entre le thanatopracteur et la famille est organisée systématiquement pour qu’ils puissent discuter ensemble de leurs souhaits et que le professionnel explique clairement les soins qu’ils prodiguent et pourquoi. « Les soins portés au défunt sont une étape primordiale. On s’est rendu compte que cet échange était important pour les proches du défunt et pouvait les aider dans leur cheminement.».
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