Les couples ayant perdu un bébé à la naissance ne sont parfois pas correctement informés par l’hôpital de leurs droits en ce qui concerne la prise en charge de leur enfant né sans vie. Dans ces moments de grande douleur, tout va trop vite et ce n’est que des semaines plus tard qu’ils comprennent que la procédure n’a pas été respectée.
Le destin des corps des fœtus morts avant la naissance obéit à une réglementation complexe et toutes les grossesses ne sont pas concernées. En effet, la possibilité d’un traitement funéraire du corps du bébé n’est possible que si la gestation a dépassé un certain stade.
Le bébé doit être :
- décédé après la naissance
- être mort né après le seuil de viabilité de 22 semaines de grossesse
- peser au moins 500 g
Dans ce cas, deux possibilités :
- Les parents peuvent demander à récupérer le corps de leur bébé pour organiser eux-mêmes les funérailles.
- Les parents peuvent choisir de confier le corps de leur bébé aux services funéraires de l’hôpital. Cependant, il s’agira d’une crémation et ce choix implique de ne pas pouvoir assister à la crémation au crématorium.
Il est important de savoir que l’établissement qui crématise le corps d’un enfant né sans vie avant un délai de dix jours commet une infraction, même lorsqu’il a l’accord des parents. Car les parents peuvent changer d’avis, au cours de ce délai, et peuvent exiger de récupérer le corps de leur enfant pour pouvoir lui dire au revoir et organiser s’il le souhaite un rituel de séparation.
L’hôpital à l’obligation d’informer les parents de cette procédure.
Dans une décision rendue le 29 septembre 2023, le Conseil d’État revient sur les règles applicables à la conservation des corps des enfants nés sans vie, afin d’éclaircir ce point vaporeux de la loi.
La froideur de cette législation fait presque oublier le fait qu’il s’agit d’enfants, parfois très attendus par les parents. Ces conditions rigides, qui ne répondent d’ailleurs pas au besoin des parents endeuillés, mettent souvent en difficulté les professionnels de santé et du funéraire.
Une affaire à l’origine de cette clarification
Cette décision fait suite à une affaire qui a eu lieu il y a plus de dix ans. Un long et douloureux combat judiciaire qui a enfin trouvé un dénouement en faveur des victimes. Pour le Conseil d’Etat, cette affaire fait office d’exemple, pour que les établissements hospitaliers revoient leurs obligations envers les familles.
Le 7 août 2013, une femme de vingt ans accouche d’un enfant mort-né à l’hôpital de la Roche-sur-Yon en Vendée. Le lendemain, à sa sortie de l’établissement, elle signe avec son conjoint un document confiant les opérations funéraires à l’hôpital. L’établissement de santé a donc procédé à la crémation cinq jours plus tard. C’est-à-dire cinq jours de moins que la durée légale.
Cinq ans plus tard, en 2018, cette maman endeuillée engage la responsabilité de l’hôpital invoquant le préjudice moral lié au fait de ne pas avoir pu elle-même procéder aux funérailles. Une épreuve particulièrement traumatisante pour elle. A l’époque, ses poursuites avaient été rejetées.
Une prise en charge défaillante
Ce manquement à la loi n’est pas la seule accusation de cette femme envers l’établissement. Elle dénonce une “défaillance fautive”.
Selon ses dires, elle était “totalement livrée à elle-même”. L’autopsie n’ayant jamais eu lieu, le couple qui attendait à l’époque son deuxième enfant n’a jamais pu connaître les causes du décès de leur bébé. Elle reproche donc à l’hôpital d’avoir traité la dépouille de son fils comme un “ simple déchet hospitalier “.
Vers une meilleure prise en charge du deuil périnatal
Le traitement du deuil périnatal et le devenir du corps des enfants décédés au moment de leur naissance sont des préoccupations très récentes, mais il semblerait qu’elles soient de plus en plus prises en considération.
S’il reste encore assez tabou, le deuil périnatal est davantage reconnu et les couples peuvent à présent donner une place à leur bébé dans l’histoire familiale. Avec la loi de décembre 2021, les parents peuvent à présent inscrire le nom complet de leur enfant sur le livret de famille. La Caisse d’allocations familiales a suivi en donnant la possibilité d’intégrer l’enfant mort avant la naissance au dossier de famille. Le Trésor public, quant à lui reconnaît aux parents le statut familial dans le calcul de l’impôt
Également mieux formés à prendre en charge le deuil périnatal, les professionnels de santé ont plus conscience de l’importance de considérer la peine des parents afin qu’ils puissent entamer convenablement leur processus de deuil.
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