Un évènement, une histoire à partager à la communauté Happy End ? Je partage mon témoignage

Lorsque l’on perd un être cher, les souvenirs sont tout ce qui nous reste. Le son de sa voix, l’odeur de son parfum, les activités que l’on partageait ensemble… Autant de choses que nous souhaiterions ne jamais oublier. C’est désormais possible grâce à l’intelligence artificielle. En 2010, à seulement 16 ans, la jeune thaïlandaise Oha perd sa mère Sunee d’un cancer des poumons. La chaîne de restauration rapide Five Star Chicken, va lui permettre de partager un repas posthume avec sa mère décédée. On vous explique.

Une publicité émouvante sur la douleur du deuil

La publicité débute sur le très émouvant témoignage de Oha. Immédiatement, on ressent l’amour qu’elle porte à sa mère, mais aussi la peine qui l’accable depuis son décès. « La seule chose dont je me souviens à propos de ma mère, c’est son sourire », confie-t-elle les larmes aux yeux. « Elle me manque énormément, je souhaiterais la prendre dans mes bras et l’enlacer pendant au moins une heure. Je voudrais dormir avec elle, être avec elle, l’emmener dans des endroits sympas. » Son souhait va presque devenir réalité…


La technologie du deepfake pour retrouver nos morts

« Nous avons utilisé près de 2 000 photos de Sunee, la mère de Oha, pour lui redonner vie de la façon la plus fidèle possible le temps d’un repas », explique les créateurs de la solution numérique. En effet, la publicité, réalisée en collaboration avec l’agence Rabbit’s Tale, spécialiste du deepfake, qui permet la reproduction de la voix (Voice Cloning) et du visage (Face Engine) d’une personne décédée. Récemment, l‘émission Hôtel du temps de Thierry Ardisson a fait couler beaucoup d’encre en redonnant vie à des célébrités décédées.

Après avoir évoqué sa maman disparue, Oha enfile un casque de réalité virtuelle, qui va lui permettre de la revoir. Le résultat est bluffant. Sourde et muette, son double virtuel utilise la langue des signes, comme elle le faisait de son vivant. Naturellement, comme si le décès n’avait jamais eu lieu, la mère demande à sa fille si celle-ci a faim et les voila en train de partager un repas en tête à tête, dans un moment suspendu du temps. « J’aimerais te revoir une dernière fois », avait exprimé Oha. C’est chose faite grâce à la technologie du deepfake.

Lire aussi : Robots, avatars, intelligence artificielle… Demain, serons-nous e-mortels ?

L’intelligence artificielle va-t-elle brouiller la limite entre vie et mort ?

Depuis plusieurs années, l’intelligence artificielle prend de plus en plus de place dans nos vies jusqu’à devenir un véritable « phénomène de mode ». Aujourd’hui, des entreprises aspirent à brouiller la limite entre la vie et la mort. Si certaines proposent de programmer des messages à envoyer post-mortem, d’autres vont plus loin et offrent la possibilité de revoir un proche décédé grâce à la réalité augmentée. Cette prouesse est rendue possible grâce à James Vlahos, qui a mis au point un Dadbot (en français : papa robot) en se servant de centaines d’heures d’enregistrement de la voix de son père décédé. Aujourd’hui, il offre à des personnes en fin de vie la possibilité de créer leur double numérique avant le grand départ.

À lire : Les strat-up vont-elles révolutionner le marché de la mort ?


Les problématiques inédites de l’intelligence artificielle

L’utilisation de l’intelligence artificielle pour réveiller les morts soulève des problématiques inédites. Laurence Devilliers, professeur en intelligence artificielle affirme qu’une telle technologie « peut devenir un vrai problème éthique si elle n’est pas correctement encadrée ». À ce jour, aucune législation ne délimite l’utilisation de cette technologie, en raison de son caractère très récent. Et des dérives ont déjà été constatées. En 2018, l’ancien président des USA Barack Obama en avait fait les frais lorsqu’un deepfake le montrant tenir des propos virulents envers Donald Trump avait été publié. En somme, il devient aisé de détourner des images et de les utiliser pour nuire à la réputation d’autrui. Mais ce n’est pas l’unique problème.

Que doit-on penser de la possibilité de communiquer avec nos défunts, comme si ceux-ci étaient encore bien vivants ? Cette pratique a-t-elle un impact sur le processus de deuil ? Le psychiatre et psychothérapeute Christophe Fauré met en garde contre l’utilisation de ces outils sur le long terme : « La pérennisation de ces pratiques porte atteinte au processus de deuil, car elle empêche l’endeuillé d’accepter la réalité de la perte. » Dans cette publicité thaïlandaise, la jeune femme semble inconsolable suite au décès de sa mère. On peut donc se demander si la revoir via ce procédé d’intelligence artificielle n’aura pas un impact négatif sur son cheminement. Comment créer un lien intérieur avec l’être aimé disparu quand il nous est encore donné la possibilité de le revoir ?

Alors, où placer la ligne rouge ? Des spécialistes planchent sur la question…

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