Elle transforme les tombes en œuvres d’art
« Le jour j’ai réalisé ma première œuvre pour le funéraire, je ne me voyais plus faire autre chose. » Laëtitia Gauthier est mosaïste depuis une quinzaine d’années mais elle s’est définitivement spécialisée dans l’art funéraire et l’art sacré il y a environ deux ans. Elle fait partie des très rares, pour ne pas dire la seule, mosaïstes à se réaliser exclusivement dans le funéraire.
« Avant même que j’ouvre mon atelier, ma toute première commande a été une plaque funéraire. J’étais enceinte de mon premier enfant et cela donnait un sens à ma création ». Mère de quatre enfants, le hasard a voulu qu’à chaque grossesse une commande de pierre tombale ou de plaque funéraire lui soit passée. « J’ai senti qu’il y avait quelque chose de l’ordre de la transmission de la vie et de la mort et que j’étais quelque part au milieu. »
Pour expliquer son parcours, elle ajoute que son premier formateur, malade depuis l’enfance et dont les jours étaient comptés, l’a fait travailler sur sa tombe. « Il avait un rapport à la vie qui était très fort et j’ai trouvé la démarche intéressante », se souvient-elle. Enfin, elle revient sur la transmission familiale : « Mes grands-parents, très religieux, étaient toujours sollicités lors des enterrements. Quand j’étais enfant, ils parlaient très facilement de décès, d’obsèques. C’était à la fois étrange et normal, cela révélait que finalement la mort fait partie de la vie et que d’une façon ou d’une autre, il vaut mieux s’y préparer. »
La mosaïste intervient souvent plusieurs mois, voire plusieurs années, après l’inhumation. Lorsque les familles n’ont pas trouvé de sépultures qui leur conviennent, laissant une dalle de béton en attente de l’ornement qui fera sens. « Lors d’un premier rendez-vous, elles me racontent la vie du défunt, me font part de leurs goûts… je réalise les dessins en fonction de mon inspiration et de ce que j’ai ressenti lors de cet échange, puis je finalise le projet avec les familles. Quand on est artiste, il est indispensable de savoir écouter ! »
Son atelier est à Blois, en Loir-et-Cher, mais Laëtitia Gauthier propose ses services sur tout le territoire. Elle utilise les matériaux les plus nobles et résistants aux intempéries : pâtes de verre de Venise qui offrent « une gamme de couleurs et une qualité exceptionnelles », des ardoises, des colles renforcées au latex et une petite quantité de résine en finition, invisible mais protectrice. Elle taille ses mosaïques à la main, sans jamais les polir pour donner le relief qui « récupère la lumière ». La mosaïque vit au gré des rayons du soleil, des nuages, de la pluie… Et parce qu’il s’agit de véritables œuvres d’art, Laëtitia délivre des certificats d’authenticité.
Éprise de liberté, la jeune femme de 36 ans répond à ses intuitions et ses envies : « J’ai créé mes métiers à mon image, je fais ce qui me nourrit ». Et pour « se nourrir », elle a suivi une formation de doula, en parallèle à son activité artistique pour accompagner les naissances mais aussi parfois le deuil périnatal. Elle est aussi l’autrice d’un blog sur les pédagogies alternatives (écriture, réflexion, pédagogie…), puisqu’elle instruit ses enfants à domicile. Complémentaire à ses autres métiers plus intellectuels, « la mosaïque est un ancrage, un travail manuel qui, outre la technique, demande à la fois une grande sensibilité, une interprétation, une mise en dessin, en lumière, en couleur… » Pour mieux accompagner les familles dans la fin de vie et le deuil, elle envisage à court terme une formation, une nouvelle activité transverse qui se mêlera à toutes les autres.
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