Beaucoup de parents en témoignent. La mort d’un enfant est un sujet tabou qui entraîne un silence assourdissant. L’entourage se sent dépourvu de mots, ne sait pas quelle attitude adopter face au séisme provoqué et n’ose souvent plus prononcer le prénom de l’absent, au risque de raviver la douleur.
Deux papas racontent ici leur combat pour rendre hommage à leur enfant et faire en sorte que leur voix de parent endeuillé soit écoutée.
Laurent Savary, 600 kilomètres en kayak pour les enfants malades
« Léonie est morte le 15 septembre 2018. Trois jours après on recevait une lettre de la CAF, et puis plus rien, il ne reste que le nom de Léonie sur le livret de famille », raconte Laurent Savary. « Les gens sont très mal à l’aise face au décès d’un enfant. Au fil des années, l’entourage nous parle de moins en moins de nos enfants décédés. Je ne veux pas qu’on oublie ma fille. » Voilà une des raisons pour lesquelles, suite à la mort de son enfant, Laurent a eu l’idée un périple en kayak sur le Rhône de Genève jusqu’à la mer.
Du 26 juin au 16 juillet, Laurent Savary va ramer et emmener avec lui une vingtaine de familles qui vivent ou ont vécu la maladie, et pour certaines, la mort d’un enfant. Un an d’entraînement physique, 600 kilomètres à parcourir, 6 à 7 heures de rame par jour, de nombreux obstacles à franchir sur le parcours… C’est pour continuer à faire vivre ces enfants “dans les étoiles” au-delà du souvenir, que Laurent s’engage dans ce voyage éprouvant jusqu’à Avignon.
Mort d’un enfant : une exposition photos pour leur rendre hommage
A l’arrivée, Laurent donne rendez-vous aux familles autour d’une exposition photos des enfants qui l’ont accompagné pendant ce voyage. Une manière souligne-t-il, de « rappeler le handicap, la maladie ou la cause du décès de l’enfant à des fins de sensibilisation, mais aussi de leur rendre hommage ». Laurent se dit « impressionné par le nombre de “merci” des parents » qu’il a reçu, preuve que son épopée trouve un grand écho auprès des familles endeuillées et éprouvées par la maladie de leur enfant.
Si vous voulez suivre Laurent dans son voyage, rendez-vous sur son site “Le Voyage d’Agatonie”, et vous pouvez lire ici l’histoire de sa fille Léonie décédée d’un cancer pédiatrique, qu’il raconte dans un livre d’hommage.
Ludovic Paris, un concert pour « ramener les vivants dans les cimetières »
« En France, le cimetière fait peur, on considère que c’est un lieu morbide. Pourtant, quand on regarde ailleurs, aux États-Unis par exemple, ça ne dérange pas les gens de venir se balader dans les cimetières et d’y prendre l’apéro », raconte Ludovic Paris.
« Pourquoi ne pourrait-on pas ramener de la vie dans les cimetières en France ? » C’est cette question qui l’habite depuis des mois, à force de se rendre au cimetière de Montrouge, seulement fréquenté par des personnes âgées, en quête de fraîcheur sous les arbres. Ludovic, lui, vient rendre visite à son fils Joseph, emporté le 4 mars 2021 par une leucémie, à l’âge de 4 ans et demi. « En écoutant dans le cimetière une musique que mon fils aimait particulièrement, j’ai eu l’impression de l’offrir à tous les morts qui reposent ici ».
Un concert de musiques du monde dans le cimetière de Montrouge
C’est ainsi que l’idée d’organiser un concert dans le cimetière a surgit dans l’esprit de Ludovic. Ayant fait partie d’une chorale pendant plusieurs années, il a recontacté ses amis chanteurs de Picpus’inging pour lancer cette première édition d’”A-Live 4 The Dead”, un concert de musiques du monde dans le cimetière de Montrouge. Les chansons seront a capella pour la plupart, ou accompagnées de guitare. L’occasion de réinvestir le cimetière autrement, mais aussi de sensibiliser à la lutte contre le cancer des enfants. « Il reste beaucoup à faire pour cette cause, beaucoup de gens ne savent pas qu’ils peuvent aider les enfants malades en donnant leurs plaquettes, notamment. Sans compter le fait que la majorité des enfants sont traités avec des traitements d’adultes non autorisés en pédiatrie, un sujet encore largement tabou dans le milieu médical. », témoigne Ludovic Paris.
Mort d’un enfant : le deuil ne doit pas être évacué par le société, il fait partie de la vie
Il veut aussi expliquer que « le deuil fait partie de la vie, il ne faut pas en avoir peur, ou vouloir l’évacuer de notre société. ». Ludovic espère ainsi faire des émules et pouvoir instituer ce concert annuel, non seulement en mémoire de son fils, mais aussi de tous nos morts. D’ailleurs, ce concert n’est qu’une première étape avant de se lancer dans son grand défi personnel : marcher sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle pendant 31 jours, sac et tente sur le dos. Pour l’heure, le rendez-vous est donc pris ce dimanche 27 juin à 15h dans le cimetière de Montrouge à côté de Paris, pour un concert d’une demi-heure, suivi d’un pique-nique dans le parc d’en face.
Pour soutenir Ludovic dans son chemin et contribuer à la recherche sur les cancers pédiatriques, voici sa cagnotte en ligne.
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