Dès mon plus jeune âge, j’ai toujours été choqué par les inégalités sociales. Il y a 20 ans, j’ai donc effectué les démarches pour refuser l’héritage de mes parents afin de ne pas entretenir l’un des plus gros outils d’inégalités : la succession. J’ai la chance d’avoir un travail et de pouvoir subvenir à mes besoins. Je ne porte donc aucun intérêt particulier à l’accumulation des richesses. Si refuser mon héritage équivaut à renoncer à une somme d’argent et à des biens qui appartiennent à ma famille depuis plusieurs générations, je préfère garder à l’esprit que contrairement à moi, d’autres personnes vivent dans la précarité.
Accepter une succession peut créer des tensions mais la refuser aussi
On sait tous que de nombreuses familles se déchirent quand vient l’heure de la succession. J’ai découvert, à ma grande surprise, que refuser un héritage était également source de tensions. Quand j’ai annoncé ma décision, il y a eu deux camps. Mon père et mon deuxième frère n’ont pas compris ma décision et cela a entraîné quelques frictions. Pour eux, le sujet de la transmission est une corde sensible. Contrairement à moi, ils sont très attachés à l’aspect « traditionnel » qui se cache derrière la succession. D’ailleurs, c’est la maison familiale qui a particulièrement cristallisé notre désaccord. Pour mon père, il était déjà acquis que ses trois fils reprendraient la maison ainsi que la production de vin. À l’inverse, ma mère et mon deuxième frère n’ont pas réagi négativement. Certes, ils ne sont pas ravis de mon choix mais ils n’ont pas pour autant essayé de me faire changer d’avis.
Mon héritage sera redistribué à des ONG
En France, il n’est pas possible de déshériter un enfant. Je savais donc qu’il fallait que je trouve une solution pour que ma décision devienne « officielle ». Mon notaire m’a proposé de signer un document qui valide mon héritage avant de le redistribuer. Je vais donc choisir plusieurs ONG à qui le reverser le moment venu. C’est ma façon de contribuer à la construction d’une société plus juste. Évidemment, je préfèrerais qu’il existe un mécanisme au niveau national pour faciliter cette démarche. L’argent de ma succession devrait aller directement aux impôts et être utilisé pour payer les aides sociales de ceux et celles qui sont réellement dans le besoin.
Mes enfants savent qu’ils ne doivent pas attendre que je meurs pour toucher de l’argent
Mes enfants connaissent ma philosophie. Ils n’hériteront de rien après ma mort. Comme je ne peux pas les déshériter légalement, il faudra certainement que je meurs en laissant un compte bancaire vide. Ce geste peut faire de moi un père indigne aux yeux de certains. Je souhaite seulement que mes enfants volent de leur propres ailes. Comme moi, ils ont grandi avec des avantages. Ils ont eu la chance d’aller à l’école pour faire leurs armes. Je ne vois pas ce qu’ils pourraient tirer d’une remise de chèques le jour de ma mort.
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